D'une Villa Gallo-Romaine...

 

Si les Romains avaient choisi cet emplacement privilégié, c'est pour la richesse des eaux de Saint-Didier, déjà connues pour leur abondance et appréciées pour leurs vertus.
Malheureusement, aucune trace ne subsiste aujourd'hui de la Villa Santi Desiderii, à part son nom, transformé avec le temps en Saint-Didier.

 

... à une forteresse au moyen-âge

 

Le Castrum féodal qui l'a remplacé jusqu'au XVe siècle ne se retrouve lui-même plus que dans les remparts et les douves, aujourd'hui comblées, qui longeaient la façade donnant sur le Parc.
L'architecture générale du Vieux Village donne aussi une idée d'ensemble de ce qui pouvait constituer la forteresse d’antan. Ainsi, le clocher de l’Église prend place au dessus de l'antique porte Nord.

 

 

D'illustres visiteurs...

 

Les Papes Jean XXII (1316 – 1334) et Benoît XIII (1378 – 1423) y séjournent, ainsi que Pétrarque pendant qu'il faisait une partie de ses études à Carpentras de 1312 à 1316. Il est revenu longtemps après en compagnie de son ami, le poète Boccace.
Nostradamus et Rabelais, tous deux diplômés de l'Université de Montpellier auront des rencontres discrètes à Saint-Didier.

 

... dans une Demeure Renaissance

 

C'est au tournant des XVe et XVIe siècles que la demeure commence à se développer sous l’impulsion de Siffreine de Venasque et d’Elzéar de Thézan. Résidence principale des Marquis à partir de 1545, le château adopte depuis 1518 l’allure d’une belle demeure de la Renaissance, dont la Cour d'honneur en est un formidable exemple.
L’inspiration italienne - le Comtat Venaissin était alors un État Pontifical - se ressent dans l’architecture typique de cette époque florissante, avec ses fenêtres à meneaux, et ses portes et passages en pierres ouvragées.

 

L'escalier en vis : XVe - XVIe Siècles

 

L’accès aux intérieurs du château se fait par un Escalier-en-vis. Majestueux par son diamètre supérieur à 4 mètres, le visiteur empruntera cet escalier, toujours le même depuis le XVIe siècle, pour découvrir les salons où les membres de la noblesse Comtadine se pressaient pour les bals et autres réceptions.

 

La salle des gardes

 

Différentes pièces s'offrent ainsi à la découverte lors du parcours de visite.
La Salle des Gardes, première pièce d’accès au château au détour de l’escalier, se caractérise par un décor modeste et un mobilier simple correspondants à sa fonction.

 

Le Salon de Musique, dit salon Mignard

 

Vous accéderez ensuite au Salon de Musique qui permettait les réceptions en petit comité.
Ce salon est réputé pour la qualité picturale de son plafond à la française et de la frise peinte par Nicolas Mignard qui orne le sommet des murs. Célèbre peintre avignonnais formé en Italie, ami de Molière, il est notamment connu pour les décors réalisés à la demande de Mazarin dans plusieurs appartements du rez-de-chaussée du Palais des Tuileries. Avec son fils Pierre, dit Mignard le Jeune, il a contribué à la décoration de plusieurs pièces du Château, dans un état de conservation remarquable et que nous pouvons encore admirer de nos jours.

 

Le Salon des jeux, dit Salon "Bernus"

 

On accède ensuite au Salon des Jeux, premier salon d’apparat où les Marquis de Thézan- Venasque tenaient audience, et qui présente des traces de fresques des XVIe au XVIIIe siècles, mises à jour lors des études patrimoniales réalisée sous l’égide de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles).
Les belles armoiries des Venasque surmontées d’un heaume à panache sur fond rouge, ainsi que le décor raffiné de rinceaux en grisaille donnent une idée du soin apporté à l’époque à l’ornementation de cette pièce.
Toutefois, l’élément le plus remarquable de ce salon est la cheminée du sculpteur provençale Jacques Bernus (1650 - 1728). Les angelots en plâtre, aujourd’hui mutilés suite au vandalisme récent, sont assis sur le manteau de cheminée surmonté d’un trumeau orné d’un bas relief ovale figurant une allégorie mythologique représentant Jupiter et Junon, l’ensemble d’une rare élégance et de grande délicatesse.

 

 

Un Château "neuf" au XVIIe Siècle

 

La demeure Renaissance ne suffisant plus à la position des Marquis, Louis de Thézan entreprit de doubler la taille du Château en édifiant une nouvelle aile sur les vestiges des anciens remparts, correspondant davantage non seulement aux goûts de l'époque, mais aussi au luxe et au faste de la famille.
Ainsi, après les guerres de religion, l’apaisement étant revenu en Provence, le château de Saint-Didier devient sous son impulsion une résidence de plaisance agréable et ouverte.
Mazarin, Vice-Légat du Pape à Avignon avant de devenir Ministre du Roi Louis XIV, fit plusieurs visites au Château. Louis XIV lui-même, délaissant sa Cour à Avignon lui fît l'honneur de sa visite en 1660, à la suite de laquelle André le Nôtre dessinera le parc en 1665.
C'est ce décor que choisit Beaumarchais en 1784 pour y écrire le cinquième acte de son Mariage de Figaro.
Les décors que tous purent admirer à l'époque sont aujourd'hui miraculeusement préservés et nous pouvons toujours contempler le faste dans lequel évoluait la belle société à cette époque.

 

La Salle de Bal

 

La salle de bal a fait l'objet d'un soin particulier : elle présente un décor fastueux qui en fait, dès le XVIIe siècle, la pièce maîtresse de la demeure. Son plafond, d’inspiration italienne, s’orne de multiples oculi simulant des vues du ciel, ainsi que d’une accumulation de motifs, arabesque et palmes. Tout autour de la salle, une frise peinte par Pierre Mignard Le jeune est agrémentée de cartouches accueillant en alternance des paysages des états pontificaux et des scènes mythologiques, entrecoupés d’une figure antique en grisaille.
Cette frise est interrompue par une cheminée monumentale de Bernus dont le trumeau est surmonté des armes des Thézan-Venasque encadré de deux aigles d’une grande vivacité. La toile centrale représentant Vénus et Adonis et peinte par Nicolas Mignard est aujourd’hui conservée au musée de Minneapolis. Jugée trop osée, elle a été remplacée au XIXe siècle par une toile d’Auguste Bigand, peintre et portraitiste actif à Avignon. Cette toile, dérobée puis retrouvée en 2018, a été restaurée pour retrouver sa place d’origine.

 

 

Le Grand Salon

 

Situé au centre de l’aile aménagée au XVIIe siècle, le Grand Salon ouvre sur une terrasse dont la vue permet d’admirer les paysages jusqu’au Mont Ventoux
C'est la pièce la plus luxueuse de la demeure, mais c'est aussi celle qui a subi le plus de modifications au XIXe siècle.
Le plafond blanc qui la surmonte recouvre un décor du XVIIe siècle particulièrement raffiné et précieux mais fortement dégradé ; les murs, préalablement habillés de tapisseries sont couverts d’un papier imitant les cuirs gaufrés et de lambris de bois foncé ; quant au sol, l’ancien parquet a été déposé et remplacé par des carreaux de grès, plus simples d’entretien.
En effet, ce salon a occupé la fonction de Salle à manger à l’époque de l’institut hydrothérapique. Une fantaisie est à noter : le jeu de pose des carreaux de grès entre la Salle de Bal et le Grand Salon recréant la croix de Venasque, symbole héraldique de la famille à l’origine de la construction du château Renaissance.
L’ensemble du mobilier Louis XIV, Régence et Louis XV a été soigneusement choisi pour permettre d’apprécier l’ambiance caractéristique d’un certain art de vivre aux XVIIe et XVIIIe siècles.
Il fait bon s’y retrouver pour de longs échanges en famille ou entre amis. En hiver, le crépitement d’un feu de bois dans la cheminée ajoute encore à son charme et sa chaleur naturelle.
 
 

Le Salon Louis XIII ou l'Antichambre

 
Le Salon Louis XIII est la pièce conçue pour impressionner les invités, avec son son plafond à la française orné d’un riche décor de caissons feints et de feuilles d’acanthe et de laurier. Les murs sont recouverts de cuir gaufrés (de Cordoue ou d'Avignon) de deux motifs différents dont la fabrication, au début du XVIIe siècle, est due à Scipion La Gratia
Ce salon jouait un double rôle dans l’organisation des pièces du château : à la fois cabinet de travail ou antichambre, salle d’attente où sont disposés des fauteuils, des chaises et des banquettes permettant aux invités de patienter avant d’être reçus par le maître des lieux.

 

La Chambre du Roy et sa Chapelle privée

 

La Chambre du Roy propose un décor particulièrement soigné. 
Les murs sont recouverts d’un ensemble de boiseries raffinées. Disposés tout autour de la pièce, des encadrements garnis de soieries réchauffent la douce harmonie créée.
Culminant à 5,40 mètres de hauteur, le plafond présente un décor de gypseries feintes au centre duquel se déploie un médaillon représentant la Chute de Phaéton, d’après un dessin de Michel-Ange
Pour accueillir d’éventuels hôtes de marque dont des Monarques, le Château de Thézan se dote, dès sa construction d’une Chambre du Roy. Le grand lit à la polonaise ainsi que le mobilier aux tons camaïeux renforcent l’atmosphère subtile de la pièce.
 
Dans le prolongement de la Chambre du Roy s’ouvre la Chapelle privée.
 
La première chapelle du château ayant été transformée en église paroissiale, il fallut trouver un nouveau lieu de culte, plus privé, à l’intérieur de l’enceinte du château. A l’occasion de la construction des nouveaux appartements au XVIIe siècle, Louis de Thézan a obtenu du vice-légat du pape à Avignon le droit d’édifier une chapelle privée dans son château.
Le décor sobre et délicat dont elle est pourvue met en valeur les symboles religieux comme le Maître Autel en bois avec sa pierre consacrée placée en son centre, le bénitier en pierre, les tableaux d’époque XVIIe et XVIIIe siècles représentant des saints personnages ou encore l’exceptionnel Christ en buis sculpté du XVIIe siècle.
 

Au XIXe Siècle, le Château change de mains

 

Les Thézan-Venasque et leur famille conservèrent le Château jusqu'en 1814, date à laquelle, sans descendance, il est vendu au Marquis Pelletier de La Garde.
Ce dernier a formidablement bien entretenu et amélioré les conditions de confort du Château qui acceuillait de nombreuses réceptions.
À la mort du marquis en 1849, son fils Henri lui succède. 
C'est à cette époque que le Jardin à la française évolue vers un Parc à l'anglaise, suivant ainsi la mode de la belle-société et se dote d'une très belle Orangerie.
Ruiné par ces travaux, Henri Pelletier de La Garde cède en 1862 sa propriété au Dr Adolphe Masson, pour y établir un centre de soins hydrothérapiques.​​​​​​

 

La création d'un Centre thermal et des Bains


Le Dr Masson semble avoir entrepris immédiatement une rénovation importante de la demeure, et son agrandissement en y créant chambres et salles de soin.
Les pièces remarquables sont restaurées, voire agrémentées de nouveaux décors.
La clientèle devait également être attirée par des salles à manger pouvant accueillir jusqu’à cent cinquante convives, un salon de billard, un salon de lecture ainsi que des écuries et remises spacieuses. Une cinquantaine de chambres sont prêtes à accueillir les malades, sans compter la domesticité.
Mais ce sont surtout des Bains-Douches, alimentés par des eaux de source, que les visiteurs pourront découvrir. Ces infrastructures uniques, atypiques et miraculeusement préservées rappellent la mode de bains, lorsque la belle société venait découvrir et apprécier les bienfaits de l’eau.

 

 

De l'abandon... à la sauvegarde

 

Le château restera longtemps un établissement de santé et fut occupé pendant les deux guerres mondiales. Ne pouvant plus répondre aux normes, la clinique fermera ses portes à la fin des années 80, ses activités étant transférées à La Gardette, un établissement moderne, toujours en activité à Saint-Didier.
Laissé à l'abandon et sombrant dans l'oubli, le rachat en 2019 marque le début d’une nouvelle ère, au cours de laquelle le Château sera rendu aux yeux admiratifs du public grâce à l’investissement, en temps et financier, de ses nouveaux propriétaires.